Une Afrique décomplexée
Désormais, les pays du Sud modulent leurs positions internationales en fonction de leurs seuls intérêts et non plus en s’alignant sur un bloc ou sur un autre.
La première conférence ministérielle de l’Alliance politique africaine (APA) aura lieu le 3 mai à l’hôtel du 2 février (Lomé).
La situation actuelle de l’Afrique est celle d’un continent sous-représenté et dont la voix est souvent inaudible sur la scène internationale.
Rien n’a vraiment évolué depuis la période des indépendances.
L’Afrique doit améliorer sa représentativité dans les institutions internationales multilatérales de coopération et sa participation à la gouvernance mondiale, mais également pour devenir une force géopolitique majeure qui exerce et assume de façon libre, dans une démarche réfléchie et stratégiquement orientée, ses responsabilités et les positions africaines sur la scène internationale.
Pour répondre à ce défi les officiels togolais ont décidé de lancer l’APA.
Un cadre informel de coopération qui permettra de fédérer les pays partageant les idéaux du panafricanisme. Et ceux déterminées à œuvrer pour une Afrique politiquement forte, indépendante, décomplexée et non-alignée
Au temps de la Guerre froide, le monde était divisé entre l’Est et l’Ouest. Le bloc de l’Est appelé parfois aussi bloc communiste, regroupait l’ex-URSS et les États situés à l’Est du continent européen. Les États qui faisaient partie du bloc de l’Atlantique se trouvaient à l’Ouest, avec les Etats-membres de l’OTAN et les États qui en étaient proches.
Ceux qui ont refusé de choisir entre ces deux blocs ont créé le mouvement des non-alignés derrière des pays comme l’Inde, l’Indonésie, la Yougoslavie et l’Égypte.
Mais à côté de ce clivage stratégique et idéologique Est-Ouest, il y avait un clivage Nord-Sud qui reflétait le concept de Nouvel Ordre Economique International, expression lancée à l’ONU en 1974 pour mettre en exergue la nécessité d’un rééquilibrage des rapports économiques entre le Nord et le Sud, en tenant compte des revendications du Tiers-Monde.
En un mot, dans les années 1970, les pays du Nord étaient riches et les pays du Sud étaient pauvres. Il fallait réunir ces deux mondes. Et, dès lors, dans le monde intrinsèquement polarisé de la Guerre froide, la distinction entre les quatre points cardinaux (Est-Ouest et Nord-Sud) était relativement claire.
Il n’y a rien de tel aujourd’hui.
Ces oppositions sont soit datées historiquement soit sans grande relevance avec la distribution de la richesse dans le monde aujourd’hui.
Sud global
Géopolitiquement parlant, en 2023, le monde est confronté à une forme de rivalité entre un Sud élargi, avec des puissances émergentes, et un Ouest qui se rétrécit, et perd de l’influence. Il y a aussi des pays riches au Sud, très riches. L’Arabie saoudite ou le Qatar en sont un excellent exemple. Et dans le monde dit occidental, il y a des pays non occidentaux comme le Japon et la Corée du Sud.
On évoque aujourd’hui le Sud global.
Le terme a brusquement jailli dans les débats d’actualité à la faveur de l’abstention d’une quarantaine d’Etats du Sud dans les votes de l’Assemblée générale de l’ONU condamnant l’agression russe en Ukraine, en 2022.
Il correspond à une réalité nouvelle des relations internationales, marquée par la fin de la bipolarité.
Désormais, les pays du Sud modulent leurs positions internationales en fonction de leurs seuls intérêts et non plus en s’alignant sur un bloc ou sur un autre.
Le Sud global est un terme souvent utilisé pour identifier les régions d’Amérique latine, d’Asie, d’Afrique et d’Océanie. En tant que tel, le terme ne fait pas intrinsèquement référence à un Sud géographique mais il est revendiqué par les États du Sud, comme un signe de ralliement. À l’image des dominés qui se liguent contre les dominants.
La traduction diplomatique du Sud global est ce que l’on appelle aujourd’hui le multi-alignement.
Il s’agit d’orienter la politique étrangère uniquement en fonction des intérêts nationaux. C’est la position du Togo d’ailleurs rappelée jeudi lors d’une intervention à la télévision du président Faure Gnassingbé.
Une diplomatie fluide ou diplomatie à la carte, qui amène des pays africains à passer des accords ponctuels avec des Etats tiers selon des besoins spécifiques.
La philosophe de Alliance politique africaine est donc de regrouper les nations africaines qui adhèrent à la philosophe du Sud global.