Un grand panier vide en équilibre sur la tête, la vieille dame joue des coudes pour s'approcher de l'Office de sécurité alimentaire du Togo (Osat) installé au beau milieu d'un marché de Lomé: c'est la bousculade pour obtenir du maïs vendu moins cher par l'Etat. Car le prix du marché de cet aliment de base des Togolais a littéralement explosé en six mois: le prix du bol de 2,5 kg de maïs a triplé, passant de 250 à 750 F.CFA (0,35 à 1,07 euro).
Comme la plupart des pays africains, le Togo est frappé par la valse des étiquettes sur les produits de base, de 50 à 200%, alors que les salaires n'ont pas suivi.Le sac de riz de 25 kg est ainsi passé de 12.000 à 16.500 F.CFA (17,17 à 23,61 euros), le lait concentré (400 g) de 400 à 500 F.CFA (0,57 à 0,71 euro) et le sucre (500 g) de 300 à 450 F.CFA (0,42 à 0,64 euro).
Visiblement, l'Etat ne peut pas faire grand chose. "Dans l'état actuel de notre économie, le gouvernement ne peut pas appliquer de mesures fiscales. De toute façon, l'expérience a montré dans d'autres pays que cela n'a rien changé à la vie des populations", affirme le ministre des Finances Adji Ayassor.
"Notre pays est malade, nous devons faire attention. De telles mesures vont fragiliser le budget de l'Etat", ajoute-t-il.
Face à la valse des étiquettes, les responsables du ministère du Commerce ont commencé à tenter de réactiver un système de contrôle des prix qui n'est plus opérationnel depuis des années.
"Certains opérateurs économiques profitent de la situation pour spéculer. Nous sommes vraiment débordés et je me demande si l'Etat peut encore faire quelque chose, après les fonds engloutis dans les produits pétroliers et le gaz domestique", confie un cadre de ce ministère.
De janvier à avril, l'Etat a en effet décaissé 10 milliards de F.CFA (14,3 millions d'euros) pour subventionner les produits pétroliers, et prévoit 7 milliards de F.CFA (10 millions d'euros) supplémentaires pour la période mai-juillet.
Même chose pour le gaz domestique: les autorités ont déboursé environ 700 millions de F.CFA (1 million d'euros) de subventions de janvier à avril.
L'Etat a mis en place le 7 mai une commission composée des représentants du patronat, des syndicats et d'associations des consommateurs chargée de faire des propositions, mais la tâche s'avère ardue.
"Le travail n'est pas facile. Nous allons déposer notre rapport avant fin juin", confie un responsable de cette commission.
Non loin de la vieille dame au panier vide, une vendeuse de bouillie de mil est assise à même le sol: "nous n'avons jamais connu ça, à ce train-là, nous allons mourir de faim un jour".